Nos robots compagnons rivalisent d’humour pour amuser les passants. Nous avons vu Pepper danser et faire des blagues en gare SNCF de Nort-sur-Erdre (Nantes) ; ou encore Emiew, ce petit robot spécialement conçu par la société japonaise Hitachi pour faire des blagues. Mais derrière la volonté d’utiliser l’humour pour augmenter les interactions entre l’homme et la machine se cache un véritable défi pour les concepteurs d’intelligence artificielle (IA), car le sens de l’humour nécessite des capacités cognitives complexes « humaines ».
Intelligence artificielle et sens de l’humour
« Je ne suis pas aussi doué que les bornes SNCF. Par contre, on est d’accord, je suis vachement plus joli », lance Pepper aux usagers de la gare de Nort-sur-Erdre dans laquelle il est utilisé pour donner des informations d’ordre général, avant de se mettre à danser pour amuser la galerie.
« Combien y a-t-il de personnes dans notre centre de recherche ? », demandent les ingénieurs de la société Hitachi à leur nouveau robot Emiew
« Nous avons deux cygnes, répond Emiew.
L’auditoire est perplexe face à cette réponse.
“T’as pigé ? Je plaisantais, renchérit-il, il y a environ 800 personnes dans le centre de recherche.”
Sophia, une humanoïde hyper réalistes créée par l’entreprise Hanson Robotics, déclare vouloir détruire l’humanité ! En blaguant…
Voilà le type de conversation que vous pouvez entretenir avec Emiew. Ce petit robot rouge de 80 cm de haut, créé par la société japonaise Hitachi, comprend le sens de toute une série de mots que ses concepteurs lui ont appris. Il peut alors répondre aux questions qu’on lui pose avec pertinence, improviser ses réponses, le tout en maniant (un peu) le sens de l’humour.
Pourquoi les robots doivent avoir le sens de l’humour
Le sens de l’humour est propre à l’humain. Réussir à doter une intelligence artificielle (IA) du sens de l’humour et l’implémenter dans un humanoïde nous rapprocherait du but ultime pour les chercheurs en la matière, à savoir créer un robot le plus proche possible de l’humain.
Et puis, le sens de l’humour requiert de comprendre les nuances de langage, de maîtriser le second degré, l’ironie, de renchérir sur le même ton. Le challenge est grand pour les chercheurs en IA. La course au sens de l’humour est en marche.
Pourquoi c’est si dur de donner le sens de l’humour à une IA
Cela n’a l’air de rien, mais doter une machine du sens de l’humour requiert d’abord de comprendre nos propres mécanismes cognitifs. Or, l’humour n’est pas perçu de la même manière selon les cultures, selon les personnalités de chacun, les expériences passées…
L’humour nécessite pour l’homme des capacités cognitives complexes mêlant empathie, conscience d’une situation et maîtrises des nuances du langage. Quelle situation est propice à l’humour, quel type de blague ou de discours fera rire votre interlocuteur ? N’avez-vous pas remarqué que votre sens de l’humour est différent selon la personne qui se trouve en face de vous, que vous adaptez votre discours au contexte, mais aussi à la personnalité de votre interlocuteur ?
IA et sens de l’humour, où en sommes-nous ?
Pour l’instant, les IA imitent le comportement humain. Elles sont effectivement capables d’apprendre d’elles-mêmes et de leurs expériences passées, mais elles ne font qu’assurer un résultat dans une situation donnée, sans passer par les mécanismes cognitifs d’empathie, de conscience de soi et des autres.
Les IA sont donc limitées dans leurs variantes humoristiques. Il existe des générateurs de blagues par exemple le programme de Sous-Entendu par Transfert Substantif (DEviaNT). Ce nom peu sexy cache un logiciel capable de générer des blagues élémentaires sur le mode “un tel entre dans un bar” ou “ta mère”. Pas de finesse, pas de nuances, donc, juste une série d’algorithmes ultra cadrés.
Pepper ou Emiew génèrent également des blagues standardisées. Ils sont par ailleurs drôles par leur mimique, leur façon de bouger et d’imiter l’humain. Ils peuvent changer le timbre de leur voix, le rythme, imiter avec brio les personnes qui se trouvent en face d’eux. C’est un comique de situation et non de langage.
Une intelligence artificielle sera dotée d’un sens de l’humour hors du commun lorsqu’elle aura appris toutes les nuances de langage existantes, mais aussi et surtout lorsqu’elle comprendra pourquoi son interlocuteur rit ou réagit de telle ou telle manière. En fait, lorsqu’elle comprendra réellement les émotions.
Mais une IA qui comprend profondément nos émotions – et s’y adapte – ne sera-t-elle pas elle-même capable d’émotions ? Là, c’est un autre débat.
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